Brève

Guerre commerciale sino-américaine sur fond d’espionnage chinois : le département de l’Intérieur des États-Unis cloue au sol ses drones

Le 19 novembre 2019 par Francis Striby

Le Jeudi 31 octobre, le département de l’Intérieur des États-Unis (DOI) a suspendu la totalité de sa flotte de drones intégrant de la technologie chinoise après la mise en lumière d’un risque d’espionnage. Cette sanction américaine visant l’entreprise chinoise DJI, s’inscrit dans un contexte de guerre économique entre les deux premières puissances mondiales.

Depuis quelques années déjà, les autorités américaines ont pris conscience du danger que représente la technologie chinoise pour leur sécurité nationale.  L’utilisation de cette technologie est répandue à travers tous les services et administrations internes du pays. Jusqu’à très récemment, les mesures prises en réaction à la menace s’étaient principalement résumées à des voeux pieux, voire à des directives non appliquées.

Le 4 août 2017 déjà, le portail sUAS News, leader en matière d’information en ce qui concerne le « business of drones » et ses domaines d’application, relayait une directive de l’armée américaine enjoignant tous les services à renoncer à l’utilisation des engins fabriqués par la société chinoise DJI, leader mondial de fabrication de drones, installée à Shenzhen. Ces instructions ont été suivies de relativement peu d’effets. 

Mais cette fois-ci les choses deviennent plus sérieuses. Ce sont les drones (UAV, Unmanned Aerial Vehicle) du département de l’Intérieur des États-Unis qui sont partiellement cloués au sol.

D’après le Wall Street Journal du 30 octobre 2019, David Bernhardt, Interior Secretary (ministre de l’Intérieur), a ordonné que les 810 drones de son ministère, tous entièrement ou partiellement fabriqués en Chine, ne soient plus utilisés. En effet, les images transmises lors de leurs missions peuvent inclure des informations sur des sites extrêmement sensibles, que les services chinois, par l’intermédiaire de DJI seraient susceptibles de collecter. Le ministère de la Sécurité Intérieure (Department of Homeland Security) s’en inquiète dans une note rapportée par CNN Politics du 20 mai 2019 car ces informations représentent un risque potentiel pour la sécurité intérieure. Cette mesure s’inscrit, toujours selon le Wall Street Journal, dans une perspective de méfiance grandissante de l’administration américaine envers ces instruments de haute technologie chinoise. De son côté, le Congrès a mis en garde contre les dangers de ces machines, surtout celles de DJI. L’administration Trump a par ailleurs déjà sanctionné d’autres compagnies chinoises, à l’instar de Huawei, qui représenterait une menace crédible pour la sécurité du pays. Frank Wang, le fondateur de DJI, affirme que ses drones sont parfaitement inoffensifs. Et pour l’administration chinoise les mesures prises à l’encontre de Huawei ne sont qu’un prétexte pour une guerre commerciale que rien ne justifie.

En début d’année, Mark Bathrick, directeur du Bureau des Services Aéroportés (Office of Aviation Services) du DOI, a fait l’éloge des drones chinois : « nous avons sauvé des vies avec ces drones. Ils ont changé la donne ». En outre, David Bernhardt, en ordonnant que ces appareils restent au sol, a immédiatement précisé que ceux utilisés actuellement pour des missions humanitaires, telles que la lutte contre les feux de forêts ou la recherche de personnes disparues, ne seront pas concernés par cette mesure drastique.

Il s’agit alors de s’interroger pour savoir si l’administration américaine parviendra à appliquer sa décision de clouer au sol tous les drones de fabrication chinoise de la flotte du département de l’Intérieur et trouver une alternative crédible. 

 

Francis Striby

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